Comte à rebours

vendredi 26 septembre 2014

Calcul des délais

Les délais, c'est important. Et les exercices de l'EEQ sont farcis de calculs divers et variés. Pour se simplifier la tâche, le tableau du fichier ci-dessous permet de déterminer facilement le mois et l'année d'expiration à partir de la date de départ et du délai (en mois) à appliquer.

Ce petit outil est appelé à évoluer rapidement pour rappeler, par exemple, les différentes règles de calculs de délais.

Calcul des délais (pdf)

vendredi 16 mai 2014

Les absents ont toujours tort ! (et le tort tue...)

De retour après un petit séjour à l'étranger, voici aujourd'hui une décision rendue il y a déjà quelques mois, mais qui illustre le pouvoir dont la Chambre de recours dispose, en particulier dans les procédures ex-parte.

Il s'agit d'un recours contre la décision de la division d'examen de rejeter la demande de brevet pour manque d'activité inventive. Dans son mémoire, la demanderesse a soumis un nouveau jeu de revendications, argumenté en faveur de l'activité inventive, et requis la tenue d'une procédure orale.

La Chambre a fixé une date pour la procédure orale. Dans sa communication selon l'art.15(1) RPCR, la Chambre a indiqué qu'elle n'était pas convaincue par les arguments de la demanderesse, et soulevait une infraction à l'art.123(2) CBE.

La demanderesse n'a pas répondu à cette communication et a explicitement renoncé à sa demande de procédure orale. La Chambre décide de maintenir la procédure orale, ce à quoi la demanderesse répond qu'elle n'y assistera pas.

Au final, lors de la procédure orale tenue, donc, en présence de la seule Chambre, la demande est rejetée pour... manque de clarté (art.84 CBE) !

Le manque de clarté n'ayant jusqu'alors pas été évoqué, se pose la question du respect du droit d'être entendu...

En substance, la Chambre rappelle que la communication selon l'art.15(1) RPCR n'a pas a être exhaustive. Dans le cas de procédures ex-parte, d'autres arguments peuvent être évoqués lors de la procédure orale. Lorsque la demanderesse renonce à participer à la procédure orale, elle renonce également à son droit d'être entendu concernant les éléments ne pouvant être considérés comme la prenant par surprise.

On ne sais bien sûr pas si la demanderesse portait un intérêt ou non au maintient de la demande (probablement pas vu son renoncement à assister à la procédure orale).

On sent quand même que la Chambre tente de se racheter de son "mauvais coup" en achevant la demande à l'aide de l'art.123(2) CBE qui, lui, a été évoqué dans la communication selon l'art.15(1) CBE...

2.1 In the present case, when preparing the communication pursuant to Article 15(1) RPBA the Board did not raise the issue of Article 84 EPC 1973. Nevertheless, when reconsidering the case in preparation for the oral proceedings the Board noted that Article 84 EPC 1973 should indeed be addressed in the oral proceedings due to the fact that, when re-reading claim 1 on file, the feature "orthogonally polarized antenna array (12, 13, 14, 15) to provide spatial diversity to the housing" appeared to lack clarity and support by the description.
As already stated, the representative of the appellant did not attend the oral proceedings. The question thus arises whether the present decision may cite the new ground of Article 84 EPC 1973 against the grant of a patent without contravening the principle of the right to be heard (Article 113(1) EPC 1973).
2.1.2 Decision G 0010/93 (OJ 1995, 172)
[...] It follows from this decision that in the present case the Board has the power to enforce any grounds against the grant of a patent independently of those put forward by the examining division in examination proceedings.
C'est sûr, la Chambre peut introduire de nouveaux motifs !
2.1.3 Rule 115(2) EPC and Article 15(3) RPBA (Article 11(3) RPBA 2003)
Rule 115(2) EPC provides that "If a party duly summoned to oral proceedings before the European Patent Office does not appear as summoned, the proceedings may continue without that party."
[...]
The explanatory notes to this Article of the RPBA (CA/133/02 dated 12 November 2002, page 20) state, in particular, that "This provision does not contradict the principle of the right to be heard pursuant to Article 113(1) EPC since that Article only affords the opportunity to be heard and, by absenting itself from the oral proceedings, a party gives up that opportunity."
Ce qui signifie, dit autrement, que les absents ont toujours tort...
2.1.5 Jurisprudence of the boards of appeal
It is established jurisprudence of the boards of appeal that an appellant which submits amended claims before the oral proceedings and subsequently does not attend these proceedings should not be surprised by a decision based on grounds which might be enforced against such claims in its absence (T 0991/07, Reasons, 2; T 1704/06, Reasons, 7; T 0546/08, Reasons, 2). In these decisions, it is emphasized that the purpose of oral proceedings is to give a party the opportunity to present its case. However, the party gives up this opportunity if it does not attend the oral proceedings (T 0546/08, Reasons, 2.2).
2.1.6 In view of the foregoing, the following conclusions are drawn.
In ex parte appeal proceedings a board has the power to enforce any grounds for refusal of an application, in particular grounds which the examining division did not consider at all or held to be satisfied (G 0010/93). Said grounds will be communicated to the appellant in writing, for example with a communication under Article 15(1) RPBA, and/or orally during scheduled oral proceedings.
The board's communication, however, has a preliminary character and does not have to be exhaustive. Thus, should the board, when reconsidering a case shortly before the oral proceedings in preparation thereof, identify new grounds for refusal of the application that were not mentioned in its previous communication, said new grounds will have to be discussed during the oral proceedings, the aim of which is not a simple repetition of what was already submitted in writing.
In ex parte appeal proceedings, if a duly summoned appellant does not attend the scheduled oral proceedings, the board, in view of the principle of procedural economy, shall not be obliged to delay its decision by reason only of the appellant's absence at the oral proceedings (Article 15(3) RPBA). Due to its absence, the appellant waives the opportunity to present its comments on new grounds which were not mentioned in the communication under Article 15(1) RPBA but are decisive for the decision. In such a case, the board's decision dealing with said new grounds, on which the appellant has not presented its comments, does not contravene the principle of the right to be heard (Article 113(1) EPC 1973).
Maintenant, la Chambre décide d'achever la demande à coup de 123(2), comme si elle n'assumait pas totalement le "mauvais coup" qu'elle venait de jouer à la demanderesse.
3. Article 123(2) EPC
3.1 The Board is aware of the fact that the above finding that claim 1 according to the appellant's request does not meet the requirements of Article 84 EPC 1973 is sufficient for concluding that the request is not allowable. As already stated above, the present decision does not contravene the principle of the right to be heard despite the introduction of Article 84 EPC 1973 only at the oral proceedings.
Nevertheless, for the sake of argument the Board holds it appropriate to deal with the further ground according to Article 123(2) EPC, especially in view of the conclusion drawn below in this respect. These additional remarks are made in view of the peculiarity of the present case that the Board's communication pursuant to Article 15(1) RPBA mentioned inter alia Article 123(2) EPC but not Article 84 EPC 1973. In the following assessment, claim 1 has been interpreted in the manner referred to in paragraph 2.2 above.
 T 1367/09

lundi 24 mars 2014

Résultats de l'examen préliminaire

L'OEB vient de diffuser les résultats de l'examen préliminaire "nouvelle génération" !

Nouvelle génération, car il ne suffisait plus d'avoir 50/100 cette année. L'OEB, voulant couper court au fléau de la réussite de masse, a en effet décidé de relever la barre à 70/100. On peut se demander s'il était nécessaire de se précipiter pour modifier les conditions de réussites au pré-EEQ, vu que l'on a encore très peu de recul sur les performances des candidats estampillés "pré-EEQ" à l'examen principal, mais bon.

Alors, quel est le bilan ?


Quelques stats :

Sur 662 candidats, 555 ont passé la barre, soit un taux de réussite de 83,8%, moins que l'an dernier (99,69%). 14 candidats ont écopés d'un zéro (très probablement des candidats ne s'étant pas présentés), la note la plus basse se situant plutôt aux alentours de 35. La note la plus élevée est de 98. En voilà un qui se mordra les doigts d'avoir loupé le carton plein, mais il n'avait qu'à bosser...

La majeure partie des gens se situent entre 80 et 90, 19,4% des candidats obtenant au moins 90/100. La note médiane est de 82,5.

Et maintenant, la question est : l'OEB va-t-il relever la barre à 75/100 l'an prochain pour atteindre un taux de 75% de réussite au pré-EQE ?

Et félicitation à tous ceux qui, dès à présent, ont la tête dans l'EEQ !

mardi 18 mars 2014

Ca chambre encore...

Est-ce pour se faire pardonner le long silence depuis la dernière livraison de décisions de recours ? Est-ce un moyen de réveiller les grands sages ? Toujours est-il que pour son unique mise en ligne de décision en 15 jours, l'Office Européen a décidé de frapper fort, avec rien moins qu'une décision destinée à être publiée dans le JO, et une autre question posée à la Grande Chambre de Recours. A savoir:
Where a notice of appeal is filed but the appeal fee is paid after expiry of the time limit of Article 108 EPC, first sentence, is this appeal inadmissible or deemed not to have been filed ?
Autant dire que l'excitation retombe tout de suite, vu qu'un parfum de déjà vu flotte dans l'air...

Bien que le fond de l'affaire soit totalement différent, l'exposé de la nécessité d'adresser cette question à la Grande Chambre de Recours est sensiblement le même que dans la décision T 1553/13. Cette décision a toutefois l'intérêt de permettre au public non germanophone et ne pouvant attendre la publication au JO d'accéder au raisonnement, en anglais cette fois. Pour faire bonne mesure, il serait opportun qu'une chambre de recours adresse la même question dans une procédure dont la langue est le français...

Un point de cette décision T 2017/12 est tout de même assez amusant. Ce recours fait suite à la décision de la division d'examen de rejet de la demande de brevet. La décision a été signifiée le 15 novembre 2011 et le recours formé le 31 mai 2012.

Pas besoin de consulter le calendrier des jours de fermeture de l'OEB pour se rendre compte que le délai de 2 mois pour former recours, et de 4 mois pour soumettre le mémoire étaient dépassés.

Le déposant a fait une requête en restitutio in integrum, soutenant que l'entreprise était en train de changer de mains, et que les négociations, plus complexes que prévues, avaient provoqué l'erreur ayant conduit à ne pas respecter le délai pour former recours. Cet argument n'a pas été retenu par la Chambre:

1.3.2 Due care in take-over periods
As a starting point the board accepts that in the course of complicated transfers of ownership of a company isolated mistakes cannot be entirely avoided despite all due care. But this does not mean that transfer negotiations alone are an acceptable excuse for failing to observe time limits. Consequently, the board cannot accept the appellant's argument that company transfer negotiations per se constitute exceptional circumstances which would establish that all due care had been taken although a time limit was missed. The board considers that the take-over of a company is a normal economic activity which does not necessarily affect everyday business. The board concludes that it was up to the appellant to provide details as to why the present take-over negotiations may have affected the patent administration in an exceptional manner.
D'autant plus que le déposant n'a apparemment pas été très explicite quant à la justification de l'influence des négociations sur le loupé des délais:
1.3.3 The facts of the case at hand
[...]The appellant did not provide any detail regarding the patent handling procedures employed by the applicant or the new owner and how they might have been affected by the "turbulent" takeover negotiations; reference is only made to "a long history of patent development" and "a hitherto flawless record". Also no concrete details were given of the nature of the error and how it occurred; all that is said is that "SnapNames or Oversee ... apparently forgot to instruct the professional representative".
Deux délais ayant été manqués (les 2 mois de la formation du recours et les 4 mois pour soumettre le mémoire), le déposant a payé deux taxes de Restitutio. Il demande le remboursement de l'une de ces taxes, en se basant sur le principe de bonne foi et sur le fait que la décision de l'OEB d'accorder la Restitutio pour ces deux évènements ne nécessitait pas plus de travail que de décider d'accorder la Restitutio pour un seul de ces évènements...
IX. In its letter of 23 September 2013 the appellant, despite having been informed via both the minutes and the subsequent communication that the board had decided this point, further argued that the fees for the omissions of filing the appeal and the grounds were in fact only one issue, as they were closely interlinked. Following the principle of good faith only one fee should be paid, because deciding on the present two issues did not cause more workload for the EPO
Evidemment, l'Office apprécie à sa juste mesure que l'on juge de la pertinence ou non de payer les taxes... Mais tout de même, au détour du motif 2, on trouve cette phrase curieuse : La Chambre relève que la structure des taxes de la CBE ne reflète pas nécessairement la charge de travail effectivement imposée à l'OEB dans chaque situation individuelle.
2. Refund of one fee for re-establishment of rights
[...]The board takes this as an indication that each time limit has to be considered separately and concludes that, in the absence of any hint to the contrary, for the number of fees to be paid the number of missed time limits is decisive.
[...]
The same reasoning applies to the requests for re-establishment of rights in relation to the filing of a notice of appeal and of the grounds of appeal, firstly because the corresponding time limits expire independently of one another, notwithstanding the fact that they are triggered by the same event, namely the dispatch of the written reasons for a decision. The board notes that for example if the time limit for filing an appeal were extended from a weekend to a Monday by virtue of Rule 134(1) EPC, this would have no effect on the expiry of the time limit for filing the grounds of appeal. Secondly, failure to meet either of these time limits individually results in a loss of the right to appeal. Article 108 EPC, first sentence, states that the appeal shall be filed within two months of the notification of the decision and Article 108 EPC, third sentence, provides that a statement setting out the grounds of appeal shall be filed within four months of notification. Failure to comply with either one of the two time limits would cause the appeal to be rejected as inadmissible, provided that the appeal fee was paid. Consequently, two fees for re-establishment were indeed due and hence a refund of one of those fees is not possible.
The applicant's counter-arguments were not convincing. It depended on the principle of good faith combined with the fact that it put no additional workload on the EPO to decide on these two omitted acts rather than only one to justify its opinion that only one fee was payable. In this respect the board notes that the fee structure of the EPC does not necessarily reflect the actual workload imposed on the EPO in any individual case. Rather, legislators have chosen lump sums as fees that are for example independent of the number of auxiliary requests to be decided or the days allowed for conducting oral proceedings.
 Le demandeur ne reverra donc pas sa taxe de Restitutio. Est-ce qu'il récupèrera au moins sa taxe de recours ? C'est à la Grande Chambre de décider.

samedi 1 mars 2014

La taxe de recours se fait chambrer

Voilà une décision qui va permettre à la Grande Chambre de Recours de penser à autre chose qu'aux tomates, brocolis, et autres poivrons jamaïquains...

Dans la décision intermédiaire T 1553/13, la Chambre de Recours a adressé la question suivante à la Grande Chambre :
Ist eine Beschwerde unzulässig oder gilt sie als nicht eingelegt, wenn die Einlegung der Beschwerde und die Zahlung der Beschwerdegebühr nach Ablauf der Beschwerdefrist des Artikels 108 Satz 1 EPÜ erfolgen?
Soit (traduction libre), "Un recours est-il irrecevable, ou bien réputé non formé, lorsque le dépôt de l'appel et le paiement de la taxe de recours sont effectués après l'expiration du délai de recours mentionné article 108 phrase 1 CBE ?".

La question peut paraître curieuse à la lecture de l'art.108 phrase 2 CBE : "Le recours n'est réputé formé qu'après le paiement de la taxe de recours". Évidemment, la Chambre est aussi au courant.

Revenons rapidement à la base de la décision. La décision de la Division d'Opposition, datée du 25.04.2013, parvient à l'Office du mandataire le 26.04.2013 (un mardi) où elle est réceptionnée par un certain "Weber". Le mandataire signe l'accusé de réception le 07.05.2013 et forme un recours deux mois plus tard, le 08.07.2013 (un lundi).

Pour l'OEB, le recours devait être formé au plus tard le 05.07.2013 (vendredi), soit la date déterminée en ajoutant la fiction des 10 jours de la R.126(2) CBE plus le délai de deux mois de l'art.108 CBE 1ère phrase.

Le mandataire tente bien de se défendre en invoquant le code des postes Allemand pour justifier que le point de départ du délai de 2 mois était la date de signature (le 07.04.2013), lequel se situait au delà du délai fictif de 10 jours. La Chambre évacue rapidement la question. Le recours n'est pas valable.
4. Die Auffassung des Vertreters der Beschwerdeführerin, dass die zweimonatige Beschwerdefrist ausgehend vom Datum der Unterzeichnung des Empfangsbekenntnisses am 7. Mai 2013, das dem Tag der tatsächlichen Kenntnisnahme entspreche, zu berechnen sei und folglich die Beschwerdeschrift rechtzeitig eingegangen wäre, entspricht nicht der Rechtslage.
Oui mais... Est-ce que le recours est "réputé non formé", ou bien "irrecevable" ? De la sanction juridique va découler le remboursement, ou non, de la taxe de recours !

Le cœur du problème provient de la formulation de l'art.108 CBE 2ème phrase, et de son articulation avec la R.101(1) CBE, soit d'une part "Le recours n'est réputé formé qu'après le paiement de la taxe de recours", et d'autre part "Si le recours n'est pas conforme aux articles 106 à 108 [...], la chambre de recours le rejette comme irrecevable, à moins qu'il n'ait été remédié aux irrégularités avant l'expiration du délai applicable en vertu de l'article 108".

Donc d'un coté, tant que la taxe n'est pas payée, le recours n'est pas réputé formé, mais si on remédie à l'irrégularité après le délai, le recours est irrecevable. Un recours peut-il être irrecevable s'il est non formé ?

La Chambre relève tout d'abord que, dans la majorité des décisions, un paiement tardif a aboutit à considérer le recours réputé non formé, et par conséquent au remboursement d'office de la taxe de recours (car le paiement a été réalisé sans cause). Elle cite, par exemple, la décision J 16/82:
2. L'une des conditions de la recevabilité d'un recours est le paiement de la taxe correspondante dans un délai de deux mois, conformément à l'article 108 de la CBE; faute de quoi, le recours est considéré comme non formé, en application de l'article 108, deuxième phrase de la CBE (cf. décision de la Chambre de recours juridique J 21/80 du 26 février 1981, JO de l'OEB n° 4/1981, p. 101).
9. La restitutio in integrum ne pouvant être accordée, le recours est considéré comme non formé, en application de l'article 108, deuxième phrase de la CBE. En raison de la relation de causalité existant avec la première phrase de l'article 108, il faut entendre par la deuxième phrase dudit article que le recours est considéré comme non formé si la taxe correspondante n'a pas été acquittée dans le délai prescrit pour l'introduction du recours (voir également décision J 21/80 du 26 février 1981, JO de l'OEB n° 4/1981, p. 101 déjà mentionnée au point 2).
10. Lorsqu'en application de l'article 108, deuxième phrase de la CBE, un recours est considéré comme non formé au motif que la taxe correspondante n'a été payée qu'après l'expiration du délai prescrit pour l'introduction du recours, un tel paiement perd sa raison d'être. Il y a donc lieu d'en rembourser d'office le montant.
Sauf que... Un certain nombre de décisions divergentes ont conclu à l'irrecevabilité du recours, et par conséquent au non remboursement de la taxe.
8.1.2 In den Entscheidungen T 1289/10, T 1535/10 und T 2210/10 wurde Beschwerde als unzulässig verworfen ohne dass eine Rückzahlung der Beschwerdegebühr angeordnet worden ist, obwohl die Beschwerde nach Ablauf der Beschwerdefrist eingelegt wurde und obwohl die Beschwerdegebühr erst nach Ablauf dieser Frist gezahlt wurde. In den Gründen wurde dies nicht behandelt.
 Et de citer à l'appui de ces décisions un extrait de la décision T 79/01:
10. [...]There is no reason to provide the appellant with a more favourable treatment in case of late (or insufficient, as in the present case) payment of the appeal fee (ie the appeal is deemed not been filed and the appeal fee is reimbursed) as in case of, for example, late filed statement of grounds (inadmissibility of the appeal). Moreover the "travaux preparatoires" seem to support this interpretation. In the "Materialien zum EPÜ" (IV/6514/61-D) is provided for, with reference to the "Entscheidungsmöglichkeiten der Beschwerdekammer" , that "Die Kammer kann feststellen, dass die Beschwerde wegen Nichtentrichtung der Gebühr unzulässig ist"
Par conséquent, il est nécessaire de trancher clairement la conséquence juridique, afin de savoir s'il faut rendre les sous ou pas (ce qui rappelle cette vielle citation : "nous rendons la justice, mais nous ne rendons pas l'argent")
In der hier zu entscheidenden Sache hängt es von der Auslegung des Artikels 108 Satz 2 EPÜ ab, ob die Beschwerdegebühr zurückzuzahlen ist. Dies wäre nur dann der Fall, wenn die Beschwerde als nicht erhoben gilt. Ist die Beschwerde unzulässig, dann kann die Beschwerdegebühr nicht zurückgezahlt werden. Die Kammer neigt zu letzterem.

La formulation que l'on retrouve art.108 CBE 2ème phrase est présente régulièrement dans la CBE. La Chambre, au point 8.2 des motifs, fait une liste assez conséquente. En revanche, autant les conséquences, par exemple, d'un paiement tardif de la taxe d'examen sont très claires (art.94(1) ens. R.70(1) CBE : on paie dans un délai de 6 mois. Une requête formée hors délais a pour conséquence que la demande est réputée retirée art.94(2) CBE, les modalités de remboursement étant déterminées dans le Règlement Relatif aux Taxes), autant un tel mécanisme semble manquer pour l'art.108 CBE ce qui, dans la langue de l'inspecteur Derrick, s'expose:
Hinzu kommt, dass die Vertragsschließenden des Europäischen Patentübereinkommens an anderer Stelle sehr wohl Formulierungen verwenden, die Konsequenzen nicht rechtzeitiger Verfahrenshandlungen regeln. So bestimmt Artikel 94 (2) EPÜ ausdrücklich, dass, wenn ein Prüfungsantrag nicht rechtzeitig gestellt wird, die Anmeldung als zurückgenommen gilt. Artikel 11 der Gebührenordnung regelt ergänzend ausdrücklich, wann und in welchem Umfang die Prüfungsgebühr zurückgezahlt wird. Regelungen dieser Art fehlen zu Artikel 108 Satz 2 EPÜ. Es erscheint deshalb als nicht systemgemäß in Artikel 108 Satz 2 EPÜ ein Wort hineinzulesen, das dort nicht steht (siehe oben 8.4.2, 1. Absatz). 
 A suivre, donc...

jeudi 27 février 2014

Si, si, c'est nouveau

La décision T 2411/09 n'est pas de celles qui tiennent réveillé toute la nuit. Les deux points relevés par la Chambre sont l'admissibilité du motif de nouveauté, et de celle d'un nouveau document.

Mais revenons un peu en arrière...

L'opposition avait été formée sur la base d'un défaut d'activité inventive (art.100(a) et 56 CBE), sur la base des documents E1 à E6. Par fax envoyé bien après la période de 9 mois pour former opposition, l'opposant a soulevé un problème de défaut de nouveauté de la revendication 1 au regard de E3.

E3 a été considéré comme état de l'art le plus proche. Le défaut de nouveauté a été discuté, même si le motif de nouveauté ne faisait pas partie de ceux soulevés lors de la formation de l’opposition, rejoignant en cela les conclusions de G 7/95 ("il est possible d'examiner le grief selon lequel les revendications sont dépourvues de nouveauté par rapport au document représentant l'état de la technique le plus proche").

L'opposition a été rejetée et un recours formé. L'opposant-requérant a basé son mémoire de recours sur l'absence d'activité inventive au regard de E3, E5 et E7, ce document étant nouvellement produit.

Dans sa lettre de réponse à la convocation orale, l'opposant-requérant a soulevé un défaut de nouveauté au regard de E3 (décidément...).

La Chambre discute donc de l'admissibilité de l'objection de nouveauté, ainsi que de celle du document E7.
2. Admissibility of the novelty objection
A lack of novelty objection was discussed and admitted into the procedure by the opposition division, as indicated in the decision. Nevertheless, in the appeal, lack of novelty was only objected in the appellant's letter dated 10 October 2013, in response to the summons to oral proceedings from the board. It is generally admitted that, based on the same ground of opposition, an appellant may develop an entirely fresh case based on new arguments (cf. Case Law of the Boards of Appeal of the European Patent Office, 7th edition 2013, IV.E.2.6.5 page 964). The objection of lack of novelty was therefore admitted into the procedure. 
Finalement, rien de bien spectaculaire. L'objection de nouveauté ayant été admise au stade de l'opposition, rien ne s'oppose à ce qu'elle soit examinée au stade du recours. Vient maintenant le cas du nouveau document :
4. Admissibility of document E7:
Feature 7 aims at reducing the power losses of the inverter switching element when switching on (cf. patent publication, section [0044]).
E7 addresses the same problem (cf. English translation of E7, page 7, lines 2 to 6)[...]. Hence document E7, which proposes a solution according to feature 7 to one of the problems addressed by the patent in suit, is considered as prima facie relevant.
E7 was filed together with the grounds of appeal. The patent proprietor was therefore not taken by surprise and had sufficient time to study the content of the document and prepare for the oral proceedings. Document E7 was therefore admitted into the procedure.
Voilà, c'est propre et net, un comportement de gentleman, et de toute façon, ça n'a servi à rien, le brevet ayant survécu indemne au recours.

mardi 25 février 2014

Cette semaine on parle d'EEQ

Eh oui, cette semaine ont lieu les épreuves de l'Examen Européen de Qualification.

Ce lundi, pour la troisième fois de l'Histoire, les candidats ont planché sur le pré-examen. La barre a été relevée, puisqu'il faut maintenant 70/100 pour obtenir un "pass". Le style des questions était sensiblement différent des deux autres années. La partie juridique ne contenait pas de questions relatives au PCT (enfin si, deux propositions parmi 40). En revanche, les questions étaient moins immédiates que les années précédentes.

Grâce à la partie technique, nous savons enfin tout du distributeur de savon.

Et bon courage à tous les candidats du "vrai" examen !

samedi 22 février 2014

T 493/11 - Remboursement du vol

Le recours fait suite à la révocation du brevet suite à opposition. Autant lever tout mystère, le recours n'y fera rien et le brevet restera révoqué car toutes les requêtes présentées étaient contraires à l'art.123(2) (et ça, c'est mal).

La Chambre a tout de même décidé de revenir sur un point de la décision.

En opposition, l'opposant a fait appel à des témoins pour établir un usage public antérieur. La division d'opposition avait fixé au 3 mars 2010 la date de la procédure orale, et au 4 janvier 2010 le délai final pour les soumissions.

Le 4 janvier, dernier jour du délai donc, l'opposant a indiqué que des témoins allaient intervenir. Le 22 février, la Division d'Opposition a annulé la procédure orale, indiquant principalement qu'elle invitait l'opposant à fournir les noms et adresses des témoins (ils ont été fournis le 20 avril 2010).

Le breveté avait demandé une répartition différente des frais, justifiée par le report de la procédure orale qui n'était pas de son fait. Il a été débouté de sa demande par la Division d'Opposition au motif que (traduction libre) "Même si les témoins avaient été nommés dans la lettre du 04.01.2010, la Division d'Opposition aurait repoussé la procédure orale, car un délai d'au moins deux mois doit être observé entre la citation des témoins et la procédure orale (R.118(2) CBE)".

Et la Division d'Opposition de conclure "Therefore, there was no abuse of procedure of the Opponent".

Sur ce point, la Chambre s'oppose à l'opposition. En substance, elle montre que l'opposant a largement trainé pour produire les éléments responsables du report de la procédure orale et, qu'à ce titre, une répartition différente des coûts est justifiée.

D'une part, elle établit le lien entre l'appel à témoins et le report de la procédure orale :
3.3.3 When cancelling the oral proceedings by communication of 22 February 2010, the opposition division in substance referred only to the respondent's last submissions and invited the respondent to indicate the name(s) and address(es) of the witness(es).
It is already evident from the above that the purpose of the cancellation of the oral proceedings was to follow the respondent's submissions and its request for the taking of evidence concerning the alleged public prior use in question and to give the respondent the opportunity to provide the information necessary to enable witnesses to be correctly summoned. It was only then that the respondent filed the names and addresses of two witnesses leading the opposition division to issue the order to take evidence by hearing those two witnesses.
Consequently, the fact as referred to by the respondent, that the appellant itself had submitted new requests quite late in the appeal proceedings, i.e. on the same day as the respondent had submitted its (incomplete) offer of evidence, obviously was not the decisive factor for the opposition division when cancelling the oral proceedings.
La Chambre indique ensuite qu'une répartition différente des coûts se justifie si le comportement d'une partie induit chez l'autre partie des dépenses injustifiées, et qui auraient pu être évitées (les mises en évidence et les soulignés sont de ma part).
3.4.2 These criteria are met in the present case since the respondent introduced important evidence, i.e. a request for a witness hearing on the relevant alleged public prior use, at a late stage of the proceedings, namely only two months before the date of the scheduled oral proceedings, without cogent reasons for the delay and in particular without submitting all necessary information, i.e. the name(s) and address(es) of the witness(es) in question. The latter was only done after a further delay of one month.
Since the prior use in question was raised and the offer of witnesses was already made with the opposition, the respondent could have come forward with the above-mentioned supporting submissions and the specific mention of witnesses for the alleged public prior use already at an earlier stage of the opposition proceedings or, at least, directly after receiving the opposition division's summons and communication. The latter was clear on the issue of the relevance of that prior use for novelty and inventive step.
If it had submitted this material at such a point in time that the two months’ time limit of Rule 118(2) EPC could have been complied with in respect of the date originally set for the oral proceedings, no postponement would have been necessary and the appellant's costs would not have been incurred unnecessarily.
Instead, the respondent waited until the final date of 4 January 2010 as set by the opposition division before submitting a "first" portion of its request pursuant to Article 117(1)(d) EPC which caused the opposition division’s further communication of 22 February 2010 leading to the submission of the "second" portion with the names and addresses of the witnesses as late as on 20 April 2010.
The respondent's argument that it was faced with difficulties in locating the two witnesses, who had changed employment, cannot hold as it had sufficient time between the filing of the opposition and mention of the prior use in July 2006 and the issuance of the summons to oral proceedings in September 2009 to find both persons who were active at that time for Topack GmbH, a company within the same conglomerate as the opponent, up to the end of 2003. Further, it does not take away the procedural fact that the responsibility for stating its complete case, including all necessary evidence, and the risk for any failure in doing so lie exclusively within the respondent’s own sphere. As a consequence, any delay causing the incurring of additional costs by the other party remains within the respondent's sphere and liability.
3.5 It, therefore, is equitable to order that the respondent meet part of the additional costs incurred by the appellant, i.e. those costs caused by the cancellation of the flight and hotel bookings due to the postponement of the oral proceedings foreseen for 3 March 2010.
Bah, au moins, avec le remboursement du vol et de l'hôtel, le breveté aura pu aller boire un coup pour se consoler...

mardi 18 février 2014

T 2265/10 - Eteint ou D-I ?

La décision T 2265/10 n'a, en soit, rien de bien extraordinaire. Enfin si, elle est en français.

Ce qui la rend un petit peu particulière, c'est que la simplicité de la situation et le ton laconique des motifs donnent l'impression de lire un exercice tout droit sortie de l'épreuve DI de l'EQE.

En substance, le brevet a été maintenu tel que modifié à l'issue de l'opposition. L'opposante a formé un recours. Entre temps, il avait été renoncé au brevet européen, ou celui-ci s'était éteint dans tous les états désignés. La requérante voulait-elle poursuivre la procédure, comme l'y autorise la règle 84(1) CBE ?

J'ai juste pris la liberté de modifier le format de la partie "exposés des faits et conclusions" pour le mettre sous forme d'énoncé (et pour ce faire, j'ai uniquement retiré la numérotation romaine des paragraphes). L'intégralité de la décision est reproduite ci-après.

Question 1 (3 points)
Avec la décision intermédiaire postée le 16 septembre 2010 la division d'opposition a décidé que le brevet européen No. 1 796 871 tel que modifié lors de la procédure d'opposition satisfait aux conditions énoncées dans la Convention. Par le téléfax daté du 16 novembre 2010, l'opposante a formé un recours contre cette décision intermédiaire. La taxe de recours a été payée à la même date et les motifs du recours ont été déposés avec le téléfax du 11 janvier 2011.
Avec la notification visée à la règle 84(1) de la CBE du 13 août 2013, la requérante a été informée qu'il a été renoncé au brevet européen avec effet dans tous les États désignés ou que ledit brevet est éteint pour ces États. La procédure pourrait être poursuivie si la requérante présentait une requête correspondante dans un délai de deux mois. La procédure serait clôturée, si la requête de reprise de la procédure n'était pas présentée dans ce délai et si l'Office considérait que dans l'état actuel de la procédure la reprise ne se justifiait pas.La requérante n'a pas répondu à cette notification. 
 Analyse de la situation légale ?

 Réponse
1. Conformément à la règle 100(1) CBE les dispositions régissant la procédure devant la division d'opposition s'appliquent à la procédure de recours, sauf s'il en est disposé autrement. Dans le cas de la règle 84(1) CBE aucune autre disposition de la CBE ne s'oppose à son application dans la procédure de recours. Par conséquent, la règle 84(1) CBE s'applique aux procédures de recours.

2. Selon la règle 84(1) CBE, s'il a été renoncé au brevet européen avec effet dans tous les États désignés ou si ledit brevet s'est éteint dans tous ces États, la procédure d'opposition et en l'espèce la procédure de recours peut être poursuivie sur requête de la requérante/opposante.

3. Le registre européen des brevets indique que le brevet européen en litige s'est éteint dans tous les États désignés.

4. La requérante n'a pas répondu à la notification du 13 août 2013, l'informant de l'extinction.

5. La continuation de la procédure de recours sans une telle requête de la requérante n'ayant pas de base légale dans la CBE, la procédure doit être clôturée. 

Limpide, non ?


T 2265/10 

vendredi 14 février 2014

T 1732/10 - Ne rien dire, c'est abuser !


J'imagine qu'il y a un monde entre ce qui se passe réellement au cours d'une procédure orale, et le ressenti qu'on a en lisant décisions. Pourtant, difficile d'imaginer ici que l'agacement qui transpire dans les commentaires de la Chambre n'ait pas été ressenti pendant l'audience...

L'opposition avait été rejetée et le brevet maintenu tel que délivré. L'opposant 3 a formé un recours. Le breveté est resté muet tout au long de la procédure écrite et ne s'est manifesté que très tard, le 9 septembre 2011, en indiquant simplement que le recours devait être rejeté, le brevet maintenu et, si nécessaire, qu'une procédure orale devrait être tenue. Le tout sans donner de raison.

La Chambre a, disons, moyennement apprécié cette attitude, allant même jusqu'à utiliser la police grasse dans les motifs de la décision (passages soulignés ci-dessous car le gras ne ressort pas)...
1.1 The Board establishes that the respondent did not file any reply to the appeals within the time limit of four months from receipt of the statements of grounds of appeal. Instead, it waited about nine months (until 9 September 2011) before filing its very brief reply requesting only that the appeal of appellant I be dismissed (the appeal and opposition of appellant II having by then been withdrawn), the patent be maintained as granted and, subsidiarily, oral proceedings be held. The respondent did not submit a single argument to substantiate why the grounds of both appeals should be regarded as unfounded.
La chambre rappelle ensuite que la réponse au mémoire de recours, qui doit être fournie dans les 4 mois, (soit le 21 mars 2011) doit contenir l'ensemble des moyens avancés par la défenderesse.

Le 15 octobre 2013, le breveté a soumis un jeu de revendications modifiées, et 5 requêtes auxiliaires, de nouveau sans explications. La motivation de ces requêtes est contenue dans une lettre du 16 décembre 2013.

L'unique soucis du breveté (du moins d'après ce que l'on peut lire dans la décision), et la motivation de son silence sont une économie de procédure. La Chambre n'est pas convaincue, et utilise de nouveau le gras :
1.4 The respondent argues that it has deliberately waited for the preliminary opinion of the Board before reacting as, otherwise, it would have had to file with its reply to the statements of grounds of appeals, as a precautionary measure, an extremely high number of new requests in view of the numerous new issues raised. This would have led to presenting the Board with an undue, possibly useless, burden. The respondent is of the opinion that it was entitled to wait for the Board's preliminary opinion before filing any reaction, exactly for reasons of procedural economy, because the requests would then be more focused. 
The Board cannot, however, share this view of the respondent, since, as put forward by appellant I during the oral proceedings, it is totally contrary to the very meaning of the Rules of Procedure
The Rules of Procedure, as a whole, make it clear that appeal proceedings are primarily written proceedings, with the emphasis on the early stages of such proceedings. Indeed, as set out in Article 12(2) RPBA, the case of the parties shall be complete at a very early stage of the proceedings, in order to ensure a fair judicial system for all parties involved and to the benefit of the efficiency of the Board, so that it can start its work on a complete case. 
The position of the respondent does not reflect this at all, unilaterally drawing all procedural advantages into its own sphere
[...]
Le point 1.4 était un festival, mais le point 1.5 n'est pas mal non plus. En plus de rappeler que la lettre contenant la motivation des modifications est arrivé très tard (3 jours avant la procédure orale), la Chambre souligne que tout cela aura du mal à être considéré comme une conduite efficace de la procédure... Extraits :
1.5 The respondent filed its main request and auxiliary requests 1 to 5 with letter dated 15 October 2013, without any substantiation with respect to novelty and inventive step of the claimed subject-matter, the main issues of both appeals. The corresponding substantiation came only with the letter of 16 December 2013, i.e. only three days before the oral proceedings.
The respondent argues in this respect that it reacted immediately upon receiving the Board's negative preliminary opinion. Regarding the even later filing of the substantiation with respect to novelty and inventive step, the respondent argues that it did not see the need to include any arguments with these requests since it considered them to be self-explanatory.
 [...]
Such behaviour of the respondent can hardly be seen as conducive to procedural efficiency for the Board or for appellant I, nor does it take account of the current state of the proceedings, both being contrary to Article 13(1) RPBA
[...]
La Chambre rappelle ensuite que ce n'est pas parce que l'on a gagné en première instance qu'on part avec un avantage en appel, contrairement à ce que semble croire le breveté...
1.6 In order to justify the late filing of the requests and their subsequent substantiation, the respondent argues further that the impugned decision was in its favour and that such decisions have a general presumption of validity before the Boards of Appeal.[...]
1.8 In light of the preceding discussion it is clear that the present respondent's behaviour is not in compliance with the Rules of Procedure. It is considered by the Board as an abuse of the appeal procedure. For this reason, the main request and auxiliary requests 1 to 5 cannot be admitted in the proceedings (see T 888/02, not published in OJ EPO, points 5 and 6 of the reasons).
Toutes les requêtes du breveté sont ensuite examinées et rejetées. Faute de requête valide encore en instance, le brevet est révoqué.

Le réveil a dû être difficile...

T 1732/10

mardi 11 février 2014

T 501/09 - Ca manque de substance !

A l'issue de la procédure d'opposition, le brevet a été maintenu sous forme modifié.

Tant le breveté que l'opposant ont formé un recours contre cette décision.

Petite originalité : les deux recours ont été considérés irrecevables !

Le cas du breveté est rapidement traité : il n'a pas soumis de mémoire exposant les motifs du recours.

Le  cas de l'opposant est traité plus en détails par la chambre. En effet, celui-ci a choisi de baser son argumentation sur de nouveaux documents au lieu d'analyser en quoi, selon lui, la décision rendue en première instance sur la base des documents produits alors était erronée. Il convient donc d'analyser si le mémoire du recours est correctement motivé (art.108 CBE et R.99(2) CBE) et si les documents nouvellement produits n'auraient pas pu l'être en première instance.
7. Documents (D11) to (D15) were not part of the first instance opposition proceedings but were filed by the appellant-opponent with its statement of the grounds of appeal (see section VI above). The appellant-opponent thus chose to base its argumentation on appeal on new evidence instead of providing reasons why the conclusions of the opposition division as regards Article 100(a) EPC (novelty and inventive step) vis-à-vis the documents on file in the first instance proceedings were considered incorrect.

En effet, en aucun cas une procédure de recours ne peut devenir une "deuxième première instance", c'est à dire basée sur des faits nouveaux et des arguments nouveaux.
10. [...] Given that the aim of opposition-appeal proceedings is to obtain a judicial review of the opposition decision, it follows that the board must as a rule take its decision on the basis of the issues in dispute before the opposition division. It can be directly inferred from the above that the parties have only limited scope to amend the subject of the dispute in second-instance proceedings and this principle is reflected in Article 12(4) RPBA. The appeal proceedings are not about bringing an entirely fresh case [...].
12. [...] Therefore the claims of auxiliary request 2 relate to subject-matter for which the appellant-opponent could have been expected to substantiate any ground of opposition relied upon within the nine months period referred to in Article 99(1) EPC. Accordingly, the filing of documents (D11) to (D15) cannot be regarded as being justified by the amendments made by the appellant-patentee before the opposition division.
15. If the appellant-opponent was surprised by the decision of the opposition division, such surprise may be an understandable subjective reaction but such subjective surprise cannot change the fact that the line of reasoning relied on by the opposition division was in the proceedings and was known to the appellant-opponent. Indeed, if the decision under appeal had been based on a line of reasoning unknown to the appellant-opponent, it should have argued that its right to be heard had been violated - which it did not. Moreover, the appellant-opponent did not state that it was surprised by the decision of the opposition division when it filed its grounds of appeal, but only when the admissibility of the documents was challenged by the appellant-patentee. [...].
17. The new documents (D11) to (D15) and arguments based thereon do not address the reasons underlying the impugned decision, in particular the issue that a claim relating to a pharmaceutical composition comprising an antibody that per se was considered not to be inventive, could be considered inventive, but bring about a fresh case, tantamount to a new opposition by attacking subject-matter which was present in the claims as granted on the basis of new evidence under Article 54 EPC and 56 EPC. [...]
Après analyse, aucun des documents (D11) à (D15) n'est considéré comme étant prima facie très pertinent, ce qui prive le mémoire de recours de sa base factuelle et évidente (ouh, le vilain anglicisme...)

Et au final, ce que l'on sentait arriver arrive :
51. The board notes that appellant-opponent's submission corresponds in essence to its submission made in its notice of opposition (see paragraphs VI.3. and VI.4.) but fails to provide any arguments why the decision under appeal is incorrect on this point, contrary to the provisions of Rule 99(2) EPC.
52. The board concludes from points 45 to 51 above, that none of the passages on pages 2, 12 and 16 of the grounds of appeal, separate or together, explain why the conclusions of the opposition division were wrong.
53. The board concludes that the appellant-opponent's case on appeal is not substantiated contrary to the requirements of Article 108 EPC, third sentence, in conjunction with Rule 99(2) EPC and therefore it has to be rejected as inadmissible (Rule 101(1) EPC).
T 501/09

vendredi 7 février 2014

R 14/12 - Faut pas se tamponner de celui qui tamponne

La décision de base ayant donné lieu à la requête en révision était un recours sur opposition s'étant soldé par la révocation du brevet européen.

Le requérant soutient que, lors de la procédure orale, la Chambre n'a donnée aucune indication relative à un point crucial sur lequel la décision est basée. De plus, la Chambre n'aurait pas fait savoir au cours de la procédure qu'elle allait suivre un raisonnement s'écartant de la jurisprudence et conduisant à conclure que D1 serait rendu accessible au public avant la date de priorité. Il y aurait donc violation fondamentale de l'art.113 CBE, ce qui est un motif de requête en révision sous art.112bis(2)(c).

La requête est considérée admissible. Un point crucial était de décider si, oui ou non, le bibliothécaire qui reçoit, tamponne les ouvrages (dont le fameux D1), et les indexe au catalogue est un membre du public ou non.

Bien sûr, il se trouve que l'ouvrage tamponné D1 n'est pas pour rien dans la révocation du brevet du requérant...

La Grande Chambre rappelle que la notification prévue à l'art.15(1) RPCR n'est pas une obligation :

2.2 Regarding the petitioner's complaint that the Board did not issue a communication under Article 15(1) RPBA, the Enlarged Board can see no breach of the procedural rules. That provision does not oblige a Board to issue communications drawing attention to matters of special significance; it merely gives it discretion to do so. If the Board decided not to issue a communication, it can be assumed that it regards the whole file – i.e. in particular all points of view present in the appeal proceedings about the requirements for public availability of documents in libraries – as relevant for the discussion at the oral proceedings. Consequently, both the Board and the parties are entitled to stress aspects which in their view require consideration.
Quant au droit d'être entendu, la Grande Chambre estime d'une part que l'opposant avait soulevé ce point, et d'autre part qu'il suffisait de prendre la perche tendue par le membre juriste... D'autant plus, selon elle, que le mandataire a bien compris où ledit membre voulait en venir !

2.4 Furthermore, it is clear from both the grounds of the petition and the observations of the petitioner during the oral proceedings before the Enlarged Board that the crucial question was discussed by the Technical Board. This follows from the specific questions asked by the legal member namely what the reaction would be if the librarian took the document and filed a patent application and why, if a single consumer could be considered to represent the public, could a librarian not likewise be so considered? For the petitioner's professional representative, it had to be clear that the legal issue addressed by these questions was whether a single individual, in particular a librarian not bound by a secrecy agreement, could be considered as constituting the public? And it is clear that he did indeed understand the reasons for these queries, because he answered that the librarian would not be an end user, that he could neither read nor understand the document, and that he would be bound by an implicit confidentiality agreement. All these arguments were an attempt on his part to refute the underlying premise that an individual librarian could inherently be considered a member of the public within the meaning of Article 54(2) EPC.
Eh oui... Quant à l'argument selon lequel la Chambre se serait éloignée de la jurisprudence, la Grande Chambre est, disons, dubitative :

2.7 The Enlarged Board is not convinced by the petitioner's assertion that the Technical Board failed to discuss the question of public availability of documents in public libraries in terms of purportedly established and consistent case law. Contrary to the submissions of the petitioner, the Enlarged Board has difficulty to speak of established case law about a notion whose definition depends on the evaluation of factual circumstances and not on the application of a principle of law. [...]



samedi 1 février 2014

J 17/12 - Registrez vous, qu'ils disaient...

Quand je travaille sur ma CBE, il y a des choses qui rentrent "relativement" facilement, et d'autres qui n'accrochent pas. Le Registre Européen des Brevets appartient, pour moi, à cette dernière catégorie (avec un paquet d'autres détails, je dois le confesser...).

Pourtant, au départ, la situation semble simple. L'art.127 CBE dispose que l'OEB tient un registre. Aucune mention n'est portée avant que la demande de brevet n'ait été publiée.

Comme les R.22-R.24 CBE ne concernent que les demandes, on en déduit fort logiquement que plus rien n'est inscrit au REB une fois le brevet délivré.

Jusque là, tout va bien. Sauf que... certaines inscriptions qui concernent le brevet européen peuvent tout de même être portées au REB.

La R.85 CBE indique que la R.22 CBE s'applique au transfert du brevet européen pendant la phase d'opposition.

De plus, la rectification/radiation de la désignation d'un inventeur dans le REB peut être faite à tout moment (R.21 CBE et Dir.A-XI.4). Tout comme sont indiquées la date et la nature de décisions de limitations ou de révocations (R.143(1)(x) et (y) CBE et Dir.A-XI.4).

Si l'on en croit la formulation de la R.143(1)(f) et (h) CBE, on devrait également pouvoir modifier les informations concernant le titulaire ou le mandataire à tout moment. Pour le demandeur ou le titulaire, la formulation est confirmée par les Dir.E-XII-4.

Revenons au cas simple, où nous n'avons affaire qu'à une demande de brevet. Est-ce qu'un transfert de cette demande peut être enregistré au REB alors que la procédure est suspendue au titre de la R.14 CBE ?

La réponse n'était pas si simple, puisque qu'il a fallu aller en recours pour trancher... (au final, la réponse est négative).

La décision citée a déjà été fort bien commentée par le blog du droit européen des brevets et K's Law. Je ne vais donc pas m'attarder.

Ce qui est intéressant (entre autre) dans cette décision, c'est le lien qui est fait entre cette inscription au registre, l'art.61(1) CBE, et la protection des tiers.

Et l'on comprend que la CBE doit être prises dans son ensemble, et non morceau par morceau.

Et l'on comprend que le chemin va être long avant de pouvoir se présenter dignement à l'EEQ (ou EQE, comme on dit plus souvent)...

Citations de la décision J 17/12

6.2 The core provision of the EPC so far as entitlement proceedings are concerned is Article 61(1) EPC, which provides various remedies if "by a final decision it is adjudged that a person other than the applicant is entitled to the grant of the European patent". In this respect it seems to the Board that if the EPO is to be required to act on such a decision, it needs to be a decision which establishes that the third party rather than "the applicant" is entitled to the grant. The Board considers that "the applicant" here can only mean the person entered on the register as applicant. The Board considers that a decision establishing that the third party rather than the former applicant, or indeed some other person, was entitled to the grant would not be sufficient for this purpose. It seems to the Board that if Allergan was correctly registered as the applicant, it was indeed necessary for Ferring to bring proceedings against Allergan, with all the increased costs which that involved. There would then also be nothing to prevent the application being subsequently transferred and registered in the name of another applicant. It follows that if the registered applicant can be freely changed while proceedings for grant are stayed, the third party's attempts to obtain the remedies available under Article 61(1) EPC could be repeatedly frustrated.

6.5 [...] Rather, Allergan argued that if a transfer of the application was registered during the national entitlement proceedings, or even after a final decision was obtained, the third party could simply institute fresh entitlement proceedings and obtain a decision against that new applicant. It seems to the Board that this is the opposite of protecting the interests of the third party, given the expense and delay involved, and taking into account the fact that such proceedings would have to be brought in whatever was the appropriate jurisdiction according the Protocol on Recognition. A similar point arose in J 20/05, where it was argued, in the context of a divisional application being filed during suspension of the parent grant proceedings, that a third party could simply bring entitlement proceedings in respect of such divisional application, and apply to stay grant proceedings on that divisional application. The Board said:

"It has to be noted that it is not possible for the claimant third party to apply to the EPO for an automatic and immediate suspension of the divisional application proceedings by way of an extension of the suspension of the parent application proceedings. On the contrary, in order to have the divisional application proceedings suspended the third party would first have to bring ("open") new national proceedings against the applicant in which it sought a judgment that it is entitled to the grant of a patent on the divisional application. The third party would then have to provide evidence that it had brought such proceedings and finally the matter would have to be decided by the EPO. All this would clearly put an additional heavy and undue burden on the third party and would be contrary to the objective of the suspension of the parent application proceedings, which is to protect its interests.

See also J 9/12, point 7 of the Reasons

6.6 Allergan argued that it was important in the public interest that the register should reflect the true position so that, for example, if someone wished to acquire a licence in this case they would know that they should apply to Allergan and not Reprise. The Legal division also considered this informational role of the register to be an important factor. However, quite apart from the fact that anyone wishing to obtain a licence would presumably be re-directed by Reprise to Allergan, there is nothing to stop the filing, during the suspension of grant proceedings, of a request to transfer the application. The effect of a stay in the light of the Board's decision will simply be that no action will be taken on the request during the suspension. While the fact of the transfer may not be apparent from the register, it will be apparent from an inspection of the public file, as will the decision to stay the grant proceedings itself. The public will therefore be sufficiently informed."

lundi 27 janvier 2014

CA de Paris - 18.05.2013 - Faut pas abuser !

Cet arrêt est "amusant" car il prouve que ce que l'on fait hors de chez soi peut nous retomber sur le coin du nez !

En substance, la société J.. a déposé une demande de brevet EP revendiquant la priorité d'une demande GB. Sur la base de la demande EP, la société J.. a fait procéder à des constats d'huissier, saisies-contrefaçon, et assignations au fond.

Rien que de très normal, finalement. C'est bien à ça que sert un brevet non ? En première instance, la société J.. a été déboutée de ses demandes, et condamnée à verser des dommages-intérêts pour... procédure abusive !

Ce à quoi elle rétorque que le fait d'assigner et de pratiquer des saisies-contrefaçon sur la base d'un brevet, même frappé d'opposition, ne peut constituer en soi une faute. Et, à priori, on aurait plutôt tendance à dire : ben oui, qu'est-ce que vous répondez à ça ?

La réponse arrive, au grand dam de la société J.. Par son comportement dans la procédure anglaise, ainsi que dans la procédure européenne, il est considéré que la société J.. ne cherchait pas à protéger son activité, mais plutôt à nuire à la concurrence, en adaptant les revendications dans le but de caractériser une contrefaçon par équivalence !

A tel point qu'au cours de l'opposition, ces modifications l'ont conduit à étendre la portée de la protection au delà du contenu de la demande telle que déposée. Et là, paf, faut pas toucher à 123(2) CBE ! Le brevet a été révoqué en recours sur opposition (T69/08).

Par conséquent, il a été décidé que la procédure en contrefaçon était abusive...

La décision ici ! 

Argumentation de la société J...
"À l’appui de leur appel, les sociétés [...] font valoir que le fait d’assigner et de pratiquer des saisies-contrefaçon sur la base d’un brevet frappé d’opposition, mais en vigueur, ne peut constituer en soi une faute, que chaque saisie-contrefaçon avait un objectif propre, celui de rapporter la preuve d’actes de contrefaçon distincts commis par chacune des sociétés visées et de déterminer l’ampleur du préjudice, et non, comme l’a retenu le Tribunal, d’exercer des pressions sur une filiale et un client de la société M.., que les oppositions n’ont été formées qu’après les saisies-contrefaçon, soit le 24 mai 2005 par la société belge C.. et le 13 juillet 2005 par la société M.., et que les modifications du brevet effectuées à la demande de l’examinateur n’ont pas eu pour objet d’incriminer les machines M..."

Réponse des intimés
"La société M.. expose, quant à elle, que les sociétés J.. [...] ont introduit une action en contrefaçon de brevet par pure mesure de rétorsion et de manière totalement déloyale et artificielle, multiplié les mesures de constat et de saisie-contrefaçon, et initié à son encontre une procédure parallèle au Royaume-Uni, que le brevet européen n’a été déposé et modifié par la société J.., non pour développer sa propre activité, mais pour obtenir un monopole afin de gêner la concurrence et nuire à l’activité de la société M.., que les assignations n’ont eu pour but que de bloquer la commercialisation des machines arguées de contrefaçon alors que les sociétés J.. [...] ne pouvaient se méprendre sur l’étendue de leur brevet au vu des différents griefs soulevés sur sa validité, dès le mois de mai 2004, dans la procédure anglaise."

Et la parole est maintenant au tribunal...
"Cependant, une procédure était déjà pendante entre les parties depuis le 5 mars 2004 en Angleterre pour contrefaçon du brevet anglais de la société J.. alors que la demande de brevet européen correspondante n’était pas encore délivrée, et il ressort tant du déroulement de la procédure d’obtention de ce brevet européen que de la procédure d’opposition devant l’OEb que la société J.., informée des risques de nullité de son brevet en raison des différents griefs de nullité opposés dans la procédure anglaise, modifiait les revendications de son brevet, aux fins d’y faire correspondre les machines commercialisées par la société M.. et les rendre de ce fait contrefaisantes comme cela résulte des termes de ses demandes de modification en date des 4 mars 2004, 11 mars 2004 et de son brusque retrait le 5 juillet 2004 de son accord de validation, en raison d’une antériorité pertinente qui lui était opposée dans la procédure anglaise et de son ultime modification des revendications du 27 juillet 2004.
Ces modifications intervenues dans le but de caractériser une contrefaçon par équivalence des machines de la société M.. qui l’ont conduite à étendre la portée du brevet au-delà du contenu d’origine et son invalidation
, pour lui permettre de fonder sa procédure en contrefaçon initiée devant le tribunal de grande instance de Paris, revêtent un caractère abusif à l’égard de cette dernière procédure.


Ce caractère abusif est corroboré par le fait que la société J.. a cherché à évincer la société M.. du marché des engins télescopiques en lançant dès 2008 sa marque [...] contrefaisant la marque [...] de la société M..., faits pour laquelle elle a été condamnée.

C’est donc à bon droit que le Tribunal a considéré que la procédure en contrefaçon exercée dans de telles circonstances est abusive."



samedi 18 janvier 2014

CA de Paris - 11/12/2012 - Pas de vacances scolaires pour les juges !

Cette décision, plus tout à fait récente, rappelle que la voie de requête prévue à l'article L.615-3 du CPI ne peut être utilisée que lorsque l'urgence le justifie.

Les juges, passablement énervés par la légèreté de la société ayant requis des mesures d'interdiction et de communication, lui font la leçon sur un ton qui ressemble à une petite engueulade...

En bref, la société N., considérant que des produits supposés contrefaisant allaient être mis sur le marché avant la date d'expiration du CCP, a sollicité par voie de requête des mesures d'interdiction et de communication. Les justifications invoquées étaient, en gros, que la présence de ces produits contrefaisant causeraient à la société N. un dommage vraiment irréparable et que la durée restante avant l'expiration du CCP ne permettait pas qu'une décision contradictoire soit rendue.

Les juges sont moyennement de cet avis...

La société N. se justifie ainsi :

"Compte tenu de la date d'expiration du CCP [...] et des jours chômés, une décision contradictoire ne pourrait être rendue avant qu'une partie significative de la durée restante du CCP ne soit écoulée. Il est d'ailleurs permis de penser que l'espoir que des mesures efficaces ne puissent être prises avant l'expiration du CCP est précisément à l'origine du lancement prématuré des produits argués de contrefaçon."

Les juges montrent tout d'abord leur agacement :

"Considérant que la Cour constate que les sociétés [...] qui ont versé aux débats 68 pièces n'ont pas cru devoir lui communiquer la requête à l'origine de la présente procédure,  que ce défaut de production est préjudiciable à l'examen du dossier; qu'il caractérise la négligence de celles-ci et leur légèreté à l'égard de la Cour;"

Et un peu plus loin :

"Considérant que [...]; que dans leur dernières conclusions, les sociétés N. ont cru devoir rajouter qu'il y avait des week-ends et des jours fériés et des vacances scolaires;"

On sent bien un léger agacement. Qui se confirme dans la suite par un petit, comment dire... rappel de cours :

"Considérant toutefois qu'il peut leur être rappelé qu'il existe une procédure urgente de référé d'heure à heure permettant de respecter le contradictoire dans un délai raccourci; qu'au surplus, les juridictions sont susceptibles de donner des dates d'audience en urgence notamment le week-end ou les jours fériés et que les vacances scolaires n'ont pas d'effet sur cette possibilité [...] que c'est si vrai que leurs adversaires ont dès la signification de l'ordonnance d'interdiction saisi le juge d'une demande de référé rétractation d'heure à heure qu'ils ont obtenu; que le juge à entendu les parties le 29 octobre 2011 [...] que la Cour constate que le 29 octobre était un samedi et le jour du délibéré était la veille d'un jour férié".